
au début j’avais le corps en friche et
la cervelle poisseuse
mon terrier était devenu caduque et
la forêt dedans était en dormance
elle ne me parlait plus
mon regard s’était calcifié sous un ciel vaseux
le courage de simplement regarder l’horizon
par delà la timidité des cimes
me manquait
les jours passent et
ton souffle
ton souffle passé ce jour-là dans ma peau
ton souffle-sève qui a traversé mes muscles
ton souffle tend désormais
tout doucement
ma colonne vertébrale
ton souffle fait vibrer les racines de mes allées
je m’en remplis
je respire
le moindre geste fait craquer des bouts de souvenirs de nous
l’horizon avale le jour et chaque matin le soleil revient avec ton odeur
à cause de toi je mets un pas devant l’autre
à cause de toi je mets un jour devant l’autre
à cause de toi je mets un mot devant l’autre
les sapins me parlent à nouveau et
reboisent mes cellules
leurs sourires caressent mon écorce et
je sens mon courage se ramifier
désormais le souvenir de toi ne me
déchire plus le ventre
il s’est métamorphosé en
une source chaude jaillie des profondeurs
une présence diffuse le long de mon dos
un vent tiède sur ma peau désertée
un mica scintillant dans mes organes
je suis toujours akène
un fruit sec qui ne s’ouvre pas et
ne contient qu’une seule graine
mais comme au désert d’Atacama
il suffira d’un filet d’eau
pour fragmenter le désert
et faire refleurir le ciel